Edito

7è NUIT du FASO DAN FANI : Impossible de faire mieux

La 7è édition de la Nuit du Faso Dan Fani organisée par l’Association des Créateurs Burkinabè de France (ACBF) a tenu toutes ses promesses le 3 juin du côté de l’espace Noisy-le-Sec à Paris. Une plateforme internationale de visibilité de l’artisanat burkinabè qui mérite d’être portée par le gouvernement.

 

Parce que l’art se nourrit des échanges, par conséquent un gouvernement qui accompagne les projets des structures privées ou associatives culturelles contribue substantiellement au développement de la Nation. Il est encore avantageux quand ce projet est porté hors du pays par une diaspora responsable.

 

Promouvoir la destination Burkina Faso

Afin de stimuler davantage l’offre culturelle et la destination Burkina Faso, l’Association des Créateurs Burkinabè de France (ACBF) a développé un projet autour d’un patrimoine national axé sur le pagne tissé appelé Faso Dan Fani. En se réunissant en France, les créateurs burkinabè ont mis en place une gamme de dispositifs, pour soutenir la création et simplifier la diffusion avec comme finalité, l’expansion de l’offre culturelle burkinabè.

Pour que cette offre culturelle bénéficie donc d’une meilleure visibilité, l’ACBF a donc décidé de lancer cette NUIT DU FASO DAN FANI à Paris. Elle est à sa 7è édition et elle est portée aujourd’hui par une dame de conviction ; la styliste burkinabè Ymar Mode, Présidente de cette association. L’objectif primordial de cette férue de la mode, quand elle a été placée à la tête de cette structure, est de former ce réseautage afin que la création artistique et culturelle burkinabè puisse aller à la rencontre du public hexagonal.

Engouement expressif

Soutenue modestement par le Ministère de la Communication, de la Culture, des Arts et du Tourisme avec l’appui de l’Ambassade du Burkina Faso en France et de quelques structures de la diaspora, l’ACBF porte aujourd’hui un évènement très convoité par toute la diaspora burkinabè résidente en Europe. De Lyon à Zurich, en passant par Genève, Bruxelles, Prague, Rome, Barcelone, Nice, Bordeaux, Montpellier, Marseille, Dijon…tous les burkinabè ne souhaitent que venir à cette Nuit. Certains repartent decus pour des raisons diverses mais reviennent les années après. D’autres partent comblés en reviennent avec d’autres communautés. Ainsi fonctionne cet évènement qui, contre vents et marées représente aujourd’hui le miroir de la culture burkinabè à l’extérieur.

Richesse du patrimoine local

 Les trois premières journées du mois de juin 2023 (1, 2 et 3) ont été marqué par la célébration des 72h du pagne tissé. Une vingtaine de professionnels de l’industrie de l’habillement et accessoires burkinabè dans la majorité, ont présenté non seulement la diversité de leurs savoir-faire, mais également, ils ont énoncé les perspectives pour une meilleure prise en compte de ce projet.

MAMODDAFRIK dirigée par Madame Pegewinde YAOGO

 

L’on a pu découvrir avec stupéfaction le projet prodigieux et fédérateur de la jeune styliste et accessoiristes MAMODDAFRIK dirigée par Madame Pegewinde YAOGO. En effet, cette structure se distingue par son ingéniosité à redonner une autre vie plus artistique et « afritude » de nos objets et accessoires (Sac, téléphone portable, chapeau, bijoux, chaussures etc.).

Résidente à Paris, Madame Pegewinde travaille en synergie avec les artisans au Burkina Faso. Une véritable industrie à la chaine est fondée dans les localités rurales pour être exportée à l’Hexagone dont les bénéfices sont reversés en Afrique. Présente à la fois au salon d’expo vente au Rosa Bonheur les 1e et 2 juin, puis ensuite au défilé le 3 juin à Noisy-Le-Sec, MAMODDAFRIK aura fait bonne impression.

La jeune styliste Gaïnga héritière d’une tribu qui a fait du pagne tissé leur principale source de revenu au Burkina Faso, a fondé tout un label autour du Faso Dan Fani. Tout comme à l’exposition et au défilé, sa marque a été l’objet de toutes les convoitises.

La Marque Gaïnga a séduit le public

 

L’audace de l’ACBF

Déjà ; organiser un évènement culturel au Burkina Faso et arriver à le maintenir dans la durée ; relève d’un miracle. Mais oser en plus, le faire en Europe et de surcroit en France, d’aucun affirment même que c’est autodestructeur ! L’absence criarde des moyens financiers et logistiques, la précarité des partenaires financiers et sponsors, la récrimination ephémère du public qui en demande beaucoup et au final rien, ont fini par fortifier le comité d’organisation de la Nuit du Faso Dan Fani.

L’un des animateurs de la soirée Jacky El Feno

 

Présenté depuis environ deux ans par deux maîtres de cérémonies célèbres au Burkina Faso, que sont : Jacky El Feno et Alino Faso, cette 7è édition a connu une satisfaction progressive. Dans une salle certes destinée aux cérémonies festives, mais qui n’est plus adaptée à cet évènement, le public a répondu massivement présent. Un dispositif son et lumière inappropriée à la dimension de la salle, ce qui n’a pas permis de contenir les décibels dans toute l’espace. Disposés en gala, les convives ont eu la possibilité de commander des menus à leur choix après s’être acquitté d’un ticket d’entrée à 30 euros (19 500 F CFA).

Après les discours et distinctions d’usage, la soirée a surtout été agrémentée par les prestations des stylites. Une dizaine au total, qui, de part leur ingéniosité et leur finesse, ont pu éblouir le public. Surtout les curieux qui découvraient l’art vestimentaire burkinabè pour la première fois. Habsatou Dicko aura parfaitement émerveillé la salle avec sa collection « Inclusion » au regard de la situation qui prévaut au Burkina Faso.

Le Sénégal fortement représenté à cette édition en tant que pays invité d’honneur, a gratifié le public de deux défilés sous le regard de l’artiste Pamika venue tout droit de Ouagadougou, uniquement pour suivre l’évènement. Georges de Baziri, Francois premier (représenté dignement par son fils Laurent Yameogo Le Saint) et la présidente de l’ACBF, Ymar Mode, tous les précurseurs de la NFDF, ont présenté leur nouvelle collection.

 

Coup de pouce des chanteurs

Il serait incongru de réunir autant de monde habillé avec leur tenue d’apparat pour un tel évènement qui magnifie l’art vestimentaire burkinabè et ne pas associer les artistes musiciens. Dans une formule « playback » aux forceps au regard d’une salle et d’une sono diminuée pour le « live », les vedettes de la chanson moderne ont néanmoins levé les décibels. D’entrée de jeu, Jules Ouédraogo avec son tout nouveau tube « ZOUNDZANDÉ » présenté en janvier à Ouagadougou, a planté le décor.

Bebeto Bongo a poussé le mercure

 

Ensuite celui qui réside désormais à Bordeaux, Bebeto Bongo a poussé le mercure avec sa prestation frémissante et tapageuse. Un show qui aura eu le mérite de réveiller la salle quelque peu endormante. La coqueluche des femmes artistes de la génération consciente, Mariah Bissongo a transformé toute la salle en « Djandjoba » ! Les femmes ont abandonné leurs vins, gros gigots de poulets pour envahir la scène et danser autour de l’auteure de « Mousso ». Visiblement très diminuée à cause de l’absence du live, la star du FEMUA 2020 a donné juste l’essentiel.

 

Le syndrome de Floby !

Piqué comme par une mouche tsé-tsé ou une abeille, les convives ont bousculé brutalement leur chaise, enlevé leur veste pour ceux qui en avait, sorti leur IPhone de dernière génération, pour littéralement investir le podium. Peu importe l’âge, peu importe celui ou celle qui le regardait, chacun esquissait les pas de danse des chansons de Floby qu’ils affectionnaient. Le Double KUNDE d’OR et PCA a transformé la salle à un véritable bal poussière des années 60. C’est comme si chacun n’attendait que sa prestation ! Pour davantage extérioriser leur joie, certains commandaient séance tenante et à 3h du matin, du champagne. Car le « Baba » venait de les transcender. La nostalgie du Burkina se lisait sur leur visage. Pendant ce temps, Floby, comme à l’accoutumée, ne faisait qu’injecter son venin musical dans le corps de cette diaspora en délire. On se croyait aussi dans une église d’évangélisation où le pasteur piaillait : « Au nom de Jésus, danse pour Floby !!!! ». C’est au petit matin que l’auteur de « Nini Toogo » a finalement quitté la salle après avoir écumé une quinzaine des tubes de son riche répertoire. A défaut du live, il leur a donné de l’émotion.

Une salle qui ne sait pourtant pas vite vider. Le DJ avait immédiatement enclenché le bal du quartier libre où les tubes d’anthologies des musiciens africains ont fait ressurgir les déhanchements de certains sexagénaires encore dans la salle.

 

L’opportunité du gouvernement

 

La 7è Nuit du Faso Dan Fani aura une fois de plus marqué les esprits de cette diaspora qui a beaucoup donné au Burkina Faso, mais qui peine à être entendu et surtout mis aux avant-postes. Toutes les générations et toutes les sensibilités y étaient présentes. Des étudiants en fin de cycle dans les grandes universités d’Europe, des cadres de grandes entreprises françaises, des selfs made men aguerris, des porteurs de startups pour le Burkina, des techniciens de haut niveau… mais qui s’interrogent sur l’avenir de leur beau pays et surtout ; de ce qu’ils vont faire avec tout ce bagage intellectuel qu’ils possèdent.

Néanmoins, il faut noter que la Nuit du Faso Dan Fani, risque stagner dans sa forme et dans son fond organisationnel si le gouvernement n’injecte pas suffisamment les moyens techniques et financiers dans cette activité qui fait honneur à son pays. Le même accompagnement substantiel que l’Etat offre aux évènements privés d’envergure internationale au Burkina Faso, doit être également déployé pour la NFDF. Les organisateurs ne peuvent plus faire mieux que ce qu’ils font actuellement. Les moyens sont limités ! La NFDF doit être doté d’une salle adéquate et d’une sonorisation à la hauteur de son standing actuel. Laisser exclusivement cette activité aux mains des profanes de l’industrie du spectacle, pourrait à la longue démotiver le public et les rares sponsors qui s’y hasardent. Comme l’on a vu dans certains évènements.

Des innovations doivent être opéré à chaque édition à l’image celle de l’expo au Rosa Bonheur. L’ACBF doit commander, financer et procéder au suivi et évaluation de l’évènement. Mais des aspects purement techniques et logistiques doivent être confiés à des structures compétentes.

Hervé David HONLA

 

 

 

 

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