Un Ministre n’est pas à la solde des rapporteurs
Edito Point de vue

Un Ministre n’est pas à la solde des rapporteurs

Le Burkina Faso vient d’être doté d’un nouveau gouvernement suite à la nomination du Premier Ministre Apollinaire Joachim Kyelem de Tambèla. Le département en charge de la Communication, de la Culture, des Arts et du Tourisme est désormais assuré par Jean Emmanuel OUEDRAOGO. Triste parfois de constater que certains acteurs culturels dans le domaine privé orientent leurs activités en fonction des affinités ou des relations avec le/la ministre. Le départ ou l’arrivée d’un Ministre pousse certains pourfendeurs, à régler soit leur compte avec le ou la sortante, ou à vanter le mérite de celui ou celle qui est nommé.

Depuis l’avènement de la crise sécuritaire au Burkina Faso, en 2015, sept Premiers Ministres se sont succédé à Kosyam avec neuf Ministres de la Culture. Certains ont démissionné, d’autres n’ont pas pu achever leur mission pour des raisons de grogne populaire entrainant des coups d’Etat. Bref les conséquences de cette instabilité politique s’imputent lourdement dans le département de la Culture et du Tourisme. Beaucoup parmi ces ministres sont nommés pour régler des situations d’urgence prônée par ceux qui prennent le pouvoir. Par conséquent, les Ministres sont évidemment contraints de prioriser ces urgences. En somme, ces gouvernements issus de la crise possèdent des missions exclusivement exceptionnelles. Ils sont nommés avec des attributions brèves voire précises.

Rappelons néanmoins qu’un Ministre dirige avant tout, les départements ministériels qui sont sous ses ordres. Il représente l’État pour ce qui concerne son ministère et par ricochet représente son administration au sein du gouvernement. Donc, il n’est pas à la solde d’un ami de gargote !

Pour le cas de la Ministre sortante Valérie KABORE de la Communication, de la Culture des Arts et du Tourisme ; elle avait été installé dans ses fonctions par le MPSR1 le 10 mars 2022 (il y a 7 mois). Sa mission première et celle du gouvernement Damiba, était de travailler à la réconciliation et au retour de la Paix.

Dès sa prise de fonction, Valérie KABORE n’avait pas tardé à assumer son rôle, en conduisant son département avec succès. Surtout dans des départements (Communication, Culture et tourisme) qu’elle maîtrise le mieux. C’est ainsi qu’elle avait d’abord entrepris de solidifier les acquis existants pour mieux restructurer et renforcer les rendements de son Ministère. Certains rajustements du personnel et des institutions ont été faites. En annonçant la tenue de la Semaine Nationale de la Culture (SNC) du 26 novembre au 3 décembre 2022, elle avait voulu rassurer les professionnels de ce secteur que, malgré les enjeux sécuritaires, la Culture doit surtout jouer sa partition. D’où « une SNC de résilience » avait-t-elle annoncée.

Malgré les nombreuses urgentes où elle avait été confronté, la fondatrice de MEDIA 2000, ne ménageait aucun effort pour recevoir et soutenir les acteurs culturels de tout bord. En sept mois, elle a octroyé 32 audiences aux acteurs culturels privés. En raison de 4 audiences et demie par mois. Pourtant, le rôle cartésien d’un Ministre, n’est pas d’accorder les audiences. Chaque ministère dispose d’une administration centrale (composée d’un cabinet et de directions centrales) et de services déconcentrés répartis sur l’ensemble du territoire national. Valérie KABORE avait donc responsabilisé son équipe pour régler certains dossiers courants sans qu’elle ne soit physiquement associée. Ce n’est pas parce qu’on a connu un Ministre au détour d’une projection cinématographique, qu’il doit impérativement et régulièrement te recevoir dans son bureau. Pire encore, un Ministre ne reçoit pas un acteur culturel ou un journaliste dans son cabinet pour des questions personnelles ou des comptes rendus de mouchards.

La révélation ou la disponibilité des informations liées au fonctionnement du Ministère n’est pas une tâche dévolue au Ministre. Pas besoin d’appeler un Ministre pour avoir telle ou telle information. Il existe des départements déconcentrés de la communication qui sont assujettis à cette tâche. Un Ministre n’est pas imposé à vous accorder systématiquement une interview quand vous faites la demande.

Régulièrement sur le terrain, Valérie KABORE se rendait plutôt disponible à faire bouger le département culturel et touristique pendant cette période difficile. Loin des bureaux feutrés. De l’ouest au centre-est en passant par le centre-ouest, elle a été au « front » pour faire face aux  doléances des acteurs culturels. L’urgence en valait la peine pour la relance de ce secteur.

Le langage d’une cheffe d’un département ministériel doit être protocolaire et adéquat à une administration dévolue aux services publics. Normal donc que Valérie KABORE délègue parfois certaines doléances à «SON » protocole ou « SON » directeur de cabinet. C’est un vocabulaire approprié à toutes les administrations publiques ou privées. Un directeur de publication d’un organe de presse, vous enverra voir « SON » comptable pour les questions d’insertion publicitaires dans votre journal.

Valérie KABORE en 7 mois, aura tout simplement servi son pays au moment où l’Etat lui avait fait appel, comme tous ses autres prédécesseurs. On ne vient pas dans un gouvernement (surtout de crise) pour perdurer. On vient pour servir son pays et son peuple, quitte à répartir prématurément. Mais l’essentiel ; il est important de répondre à l’appel et de faire objectivement son job. Valérie KABORE l’a bien fait et elle repart grandi et honorée. La preuve ; elle est toujours sollicitée et disponible à accompagner les évènements culturels. C’est d’ailleurs la seule ex-ministre du gouvernement DAMIBA qui est encore immensément en activité dans des activités culturelles.

Enfin ; un acteur culturel (journaliste, artiste, promoteur, techniciens, experts etc.) n’a pas besoin d’aimer la tronche d’un ou d’une ministre pour exercer son métier avec passion et sans complaisance.

Hervé David HONLA

 

 

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