Sylvie Sabine Vagbe dite Sly 2 Sly séjourne depuis 72h au Burkina Faso. Malheureusement, venue pour deux grands spectacles ; un show en live et un showcase privé. Le drame national ne lui a pas permis de communier avec ses mélomanes. L’auteure de « Dieu te voit » sera néanmoins en showcase privé et promet revenir en 2022 après la sortie de son prochain single prévu pour le 1er décembre 2021. Mais, qu’à cela ne tienne, cette icône de la musique ivoirienne, s’est prêtée à nos questions ce jour 18 novembre. Elle revient sur l’objet de sa présence au Faso, qui va au-delà des spectacles et notamment sur le regard qu’elle porte sur les artistes burkinabè en particulier et la musique africaine en général.
Qu’est ce qui nous vaut cet honneur, notamment ta présence au Burkina ?
Très belle terre d’accueil, j’ajouterai. Comme on a l’habitude de le dire ; « Le Pays des Hommes Intègres ». Vraiment, j’ai été reçu avec beaucoup de plaisir et de bonheur. Je suis là, pour un showcase privé orchestré par le manager burkinabè Kenzo Cash Ligdi. Je ne pouvais pas être au Burkina sans passer sur vos chaînes de télévision, radio et presse écrite. Parce que les burkinabè ont besoin aussi de communiquer avec moi. Ils ont entendu et écouté mes chansons et il fallait absolument que je les informe que je suis là…
…C’est ta première ?
Oui ! C’est ma première fois de venir au Burkina Faso.
Tes impressions ?
En fait, tout pays ; qu’il soit beau ou autre chose, tout dépend de l’accueil. En termes d’accueil, honnêtement, suis comblé et très à l’aise. Vous voyez bien… (NDLR : Elle nous montre le cadre enchanteur dans lequel on l’a logé. Dans une somptueuse suite au cœur de Ouaga 2000) …(Rires)…
…Malheureusement, le Burkina Faso traverse des périodes très douloureuses en ce moment. Pour une artiste de ton gabarit, quel message peux-tu adresser ?
Je suis arrivée le même jour où ce drame est arrivé. J’ai été très peinée ! Car je devais jouer dans un espace culturel en live, mais à cause du deuil national, je n’ai pas joué. Les organisateurs m’ont dit que je vais uniquement faire le showcase privé après le deuil national. Quand on m’a donc expliqué ce qui se passait séance tenante dans le pays, j’ai eu sincèrement mal au cœur. En tant qu’africaine d’abord, ensuite tant qu’artiste. Parce que nous sommes la voix des sans voix et malheureusement, ce sont des pères de familles qui partent de cette manière-là. Ce sont des nombreuses familles qui sont endeuillées et déjà, je suis meurtrie dans ma chair. Quand tu arrives, tu n’as envie de rien faire. Car tu veux compatir avec le peuple burkinabè.
Nous savons qu’au Burkina, tu as des fans mais aussi les néophytes, notamment ceux qui entendent parler de toi mais chercheraient davantage à te découvrir. Succinctement comment peut-on appréhender ton parcours dans la musique ?
(Rires) j’étais invitée à la radio hier (NDLR ; entretien réalisé ce jour 18 novembre) et un monsieur disait ; « …Moi c’est Dieu te voit, mon coup de cœur. J’entendais parler de Sly, mais, c’est la chanson qui a été joué dans tous les médias au Burkina ». Pour ceux qui ne connaissent pas vraiment Sly : je suis une artiste chanteuse ivoirienne qui débute sa carrière en 1998. Mais bien avant, en tant que choriste de Gadji Celi, Woody, et de pleins d’artistes… J’ai fait des featuring avec la Jet7 et beaucoup d’autres artistes. Je ne veux pas parler de moi, mais j’aime bien que les autres en parlent. Aujourd’hui, ça va faire quatre ans que je suis très présente en Afrique. Parce que, vivre en Europe et faire de la musique en même temps pour plaire à ses fans africains, ce n’est pas évident. Donc j’essaie d’être très présente en Afrique en apportant toujours de nouvelles œuvres musicales pour le plaisir des mélomanes.

Certains journalistes comme moi, avions eu la chance de suivre depuis le Burkina Faso, la sortie tonitruante de ton single « Dieu te voit » le 16 janvier 2019 à Abidjan. Pourquoi avoir fait ce grand retour hyper médiatisé ?
Je suis revenue en force par rapport à la demande. Il y a tout genre de fans. Il y a ceux qui te regardent loin. Il y a ceux qui s’apprécient. Enfin, il y a ceux qui t’admirent et aiment ce que tu fais. Ces personnes-là, sont tout le temps là en train de me dire : « …Mais Sly ; nous tes fans, on a l’impression que tu nous abandonnes ! Que la musique n’est vraiment pas une passion pour toi… ». Pourtant, la musique, c’est ma véritable passion. Exclusivement à ces personnes-là, je voulais prouver que Sly est là. Pas pour le fun, mais pour leur donner une qualité de musique impeccable. Parce qu’aujourd’hui, les artistes à voix, sont rares.
Tu séjournes au Faso ; Que représente le marché musical burkinabè pour toi ?
En même temps ; je n’ai pas mal d’amis chanteurs burkinabè dont Imilo Lechanceux…Je suis très heureuse qu’il y a dix ans en arrière, on ne connaissait pas vraiment les chanteurs burkinabè. Je connaissais plutôt le regretté Nick Domby qui vivait en Europe et que j’aimais énormément. Puis plus tard, on découvre une flambée des artistes burkinabè qui se réveillent. Ils nous proposent une qualité de musique extraordinaire ! Je citerai entre autres ; Floby, Imilo, Dez Altino…Bref il y a tellement ! J’ai d’ailleurs découvert une talentueuse artiste burkinabè au PRIMUD du nom de Tanya. J’étais étonnée de voir la qualité de sa musique et son brin de voix qui pouvait sortir de là ! J’ai dit beh waouh finalement, il y a une concurrence qui ne dit pas son nom (Rires…)

Peut-on rêver une collaboration avec des artistes burkinabè ?
Pourquoi pas ?! C’est un beau rêve. A mon avis, pour un artiste qui veut s’implanter dans une autre contrée, il est bien un peu de prendre de la sève musicale de ce pays-là. Un featuring est toujours bon dans une telle circonstance. Parce que c’est un excellent flux migratoire. L’artiste vient chez toi et vice versa, tu vas aussi chez lui. C’est la raison pour laquelle, on dit que la chanson est transversale et intemporelle. Car elle s’infiltre dans les traditions. On n’est pas obligé de comprendre les ethnies burkinabè pour aimer une chanson de ce pays.
En Côte d’ivoire, la promotion des œuvres musicales subit des mutations hallucinantes avec cette communication qui se transforme en buzz. Est-ce selon toi, une stratégie payante ?
Je ne suis pas friande de buzz ! Parce que je me dis ; un artiste qui sait ce qu’il veut apporter dans la société, n’a pas besoin de buzz. Malheureusement, on a vu Arafat qui était dans son jeu à lui. Et ce jeu lui allait si bien : Car quand quelque chose colle bien à une personne, il faut le reconnaître. C’était son petit marché à lui et il savait comment s’y prendre. Mais tout le monde ne peut pas le faire. Et donc, quand toi tu le fais et que ça devient « bad », ce n’est pas jolie. En ce qui me concerne, j’ai quelque chose à proposer. C’est quand tu n’as rien à proposer que parfois, tu es obligé de passer par une alternative pour arriver à tes fins. Kerozen n’est pas dans les buzz, pourtant, il est écouté partout. Il y a Mix 1er qui ne fait pas de buzz, mais qui possède une voix énorme. Nous avons Josey qui n’est pas dans le buzz, mais qui joue et est aimée partout. Donc en somme, il y a des artistes ivoiriens qui ne font aucun buzz mais leurs œuvres s’exploitent à volonté dans le continent.

Tu fais la navette entre l’Europe et le continent africain. Mais on constate que l’Afrique est de plus en plus devenue l’eldorado des grosses firmes musicales et les artistes d’ailleurs commencent à s’y intéresser. Comment appréhendes-tu cette nouvelle industrie musicale ?
Pour plaire aux autres, il faut d’abord être connu chez soi ! Si on n’avait jamais entendu Sly 2 Sly en Côte d’Ivoire, je n’allais pas être ici en train de répondre à vos questions au Burkina. Donc Il est important pour nous, même vivant en Europe, de venir faire la promo ici en Afrique. Parce que, c’est notre terre natale. Quand cette terre te bénie, tu peux aller partout où tu veux. Aujourd’hui Fally Ipupa fait les featuring énormes ! Parce que ; déjà au Congo, c’est la Côte d’Ivoire qui est devenue la plaque tournante de la musique africaine. Pour ne pas faire vexer certains, je pense que ce jugement fait l’unanimité ; tous les artistes passent par la Côte d’Ivoire avant d’émerger ailleurs. Donc les artistes européens qui font les featuring avec Arafat et autres sont conscients que ces artistes possèdent un fanbase très puissant. C’est important d’avoir ce fanbase chez nous avant d’aller conquérir d’autres continents.
Le rendu musical se présente sous deux formes principales : le Live et le Playback. Avec l’avènement de nouvelles technologies, quelle est la meilleure option plausible pour se frayer un vrai chemin ?
Admettons néanmoins que cette dernière décennie, il y a plus de live que de playback ! Avant tu pouvais voir des artistes connus arriver dans un gala pour faire du playback. Mais aujourd’hui, on a du live partout. Il y a même des espaces où l’on ne joue que du live. Donc, je suis contente de cette vision. Car les artistes qui n’avaient pas le vocal qu’il fallait, sont en train de travailler pour faire bonne impression dans les espaces strictement live. C’est déjà un bonus de voir comment les artistes peuvent aujourd’hui s’exercer dans le live. Néanmoins, il est important de faire du bon live, mais après, il y a des cérémonies où la logistique et le backline ne permettent pas de mettre les artistes en live. Car la cérémonie n’est pas faite pour ça. C’est par exemple une cérémonie de remise de prix. En prenant l’exemple du PRIMUD, il y a par exemple Roga-Roga qui a fait du playback. Mais toi et moi et les autres savons que c’est un grand chanteur du live. Mais, quand il fait un playback, ça ne choque pas. C’est compréhensible.

Tu as parlé de fanbase, moi je parle de représentant légal de tes œuvres dans les pays africains. Est-ce que tu en possèdes au Burkina et ailleurs ?
J’en ai déjà au Burkina. Si lui, il est là (NDLR : en présentant du doigt son assistant manager hors du champ de l’interview), c’est qu’au Burkina, nous en avons. En somme, nous essayons aujourd’hui d’être professionnel, ce qu’on n’a pas été auparavant. A l’époque, l’artiste était lui-même manager, éditeur, producteur…et au final, c’est le mythe qui se perdait. Il est donc important pour un artiste qui a envie de grandir à l’échelle internationale, d’avoir un représentant dans chaque pays. Moi je vis en Europe et j’ai mon manager général que tout le monde connaît, c’est Vino l’Ambassadeur. J’ai mon manager à Abidjan qui se nomme El Fazo Pascal. Aujourd’hui, au Burkina, j’ai un représentant qui est Kenzo Cash Ligdi. Donc dans chaque pays, j’essaye d’avoir des représentants, qui eux ; vont suivre au niveau des médias pour que la com puisse passer. Et l’artiste que je suis, je me dois d’être présente dans ces pays en cas de besoin.
Tu possèdes un répertoire musical alléchant. Certains mélomanes burkinabè ont souvent l’embarras de choix. Pourrais-tu les orienter quant à tes œuvres prioritaires ?
Hum ! Une artiste comme moi, j’aime souvent laisser les fans faire leur propre choix. Car toutes mes œuvres se valent…(Rires). Hier j’étais invitée à une chaîne de télé et l’artiste demandait le tube « Dieu te voit » tandis que la technique exigeait un autre. En tant qu’artiste, je n’ai pas de choix à faire. Mais je pense que les burkinabè ont vraiment adopté Sly 2 Sly à partir de « Dieu te voit ». Après, ils ont pris du plaisir à écouter l’ensemble de mes œuvres.
Parlant de tes œuvres ; comment et où est ce qu’on peut s’en procurer ?
Sur tous les sites de téléchargement légaux qui sont en ligne et tout le monde peut y avoir accès… Malheureusement, concernant la piraterie, je trouve que c’est méchant. Les œuvres émanent de la recherche de l’esprit. Quand quelqu’un voit un artiste qui se démène, travaille, cherche, compose ; si sincèrement vous avez envie de le soutenir, payez leurs œuvres ! C’est important pour l’artiste afin que demain, il ne puisse pas mendier quand il aura des difficultés.
Je m’en voudrais de ne pas poser cette question. Il y a une ressemblance flagrante entre Josey et toi. Vous vous ressemblez presque trait pour trait. Qu’est ce qui vous lient toutes les deux ?
Cette question est certes récurrente, mais en même temps, les gens ont le droit de me la poser. Comme j’ai l’habitude de le dire, c’est ma petite sœur ivoirienne. Nous venons de la même terre. Nous ne sommes pas parenté. Beaucoup pensent que nous sommes de la même famille, mais non. Il n’y a aucun lien de parenté. Le seul lien c’est la Côte d’Ivoire. Je suis la « grande sœur » de Josey et il n’y a aucune animosité. Quand il y a un spectacle représentatif de la Côte d’Ivoire, je me déplace pour assister. Au palais de la Culture, j’y étais….
Comment tu trouves ses œuvres ?
Pour moi, elle représente dignement la Côte d’Ivoire ! Elle est la fierté de notre pays. Je pense qu’on est en train de démontrer que l’Afrique peut sortir des choses de valeur. Quand on écoute Josey, Sly, Kerozen et pleins d’autres artistes, on se dit que l’Afrique regorge de talents. Nous n’appartenons pas seulement aux ivoiriens, nous appartenons à l’Afrique.

Tu es présente dans le cadre privé. Tu repartiras certainement, sans pouvoir créer cette osmose avec tes fans. Certains seront un peu déçus…
Je te l’avais signifié au début. J’étais venue pour deux choses ; le showcase privé, mais je devais jouer aussi dans un espace public. A cause du deuil national, je ne peux pas ! Donc nous allons simplement nous baser sur le spectacle privé…
…Ton séjour s’achève donc ce soir ?
Dommage, mon séjour s’achève ce soir, ensuite je rentre en Côte d’Ivoire. Mais, je vais revenir très vite car j’ai une œuvre qui sortira en décembre. Dès lundi, elle sera déjà sur les plateformes de téléchargement…
…On peut déjà avoir l’exclusivité du titre ?
(Rires…) Je te laisse le soin d’aller sur ma page et dès lundi, tu auras l’exclusivité dans toutes les plateformes. Il faudrait déjà que les gens puissent fredonner pour le mettre dans leur salon pour les fêtes de fin d’année.
Est-ce qu’il y a des dates prévues pour les spectacles au Burkina très prochainement ?
C’est prévu pour 2022. Pour le moment on prépare un single, en prélude à la sortie d’un album. Forcément, je vais revenir au Burkina, on va miser de nouveau sur la promo ici et je pense qu’à partir de cet opus, on aura des dates concrètes.
Un dernier mot à l’endroit de tes fans ?
Eh ! Vous savez que je suis là hein ! Dieu nous voit et quand il nous voit, ça veut dire que tout va bien. Et quand tout va bien, on doit se faire. Et quand on doit se faire, on se donne un genre. Donc bientôt, c’est le genre qui arrive ! Je suis avec vous jusqu’à demain ! On est ensemble.
Hervé David HONLA