Le film «LINGUI» du réalisateur Mahamat-Saleh Haroun en compétition officielle à CANNES a été présenté en grande première le 8 et 9 juillet 2021 au Palais des Festivals. C’est le premier parmi les deux films africains en en lice pour la Palme d’Or qui vient d’être projeté.
«Lingui» est le troisième film du réalisateur qui a été choisi en sélection officielle à Cannes après «Homme qui crie» en 2010 et «Grisgris» en 2016. Cette fois-ci, il s’attaque frontalement à la société tchadienne à travers l’avortement. C’est u film d’1h 27 mn qui met presqu’à nu le processus lugubre de la pratique de l’avortement et de l’excision. Dans son pays le Tchad, où elle est strictement interdite par la loi et la religion musulmane, Mahamat filme le Tchad actuel avec sa modernité, ses traditions et ses pratiques. Il collabore toujours avec ses personnages fidèles qui l’accompagnent dans tous ses projets, à l’instar de Hadje Fatime NGOUA.
En effet ; Maria 15 ans, risque devenir une fille mère comme sa mère Amina qui l’élève depuis qu’elle avait été rejeté par sa famille. Amina vit piètrement grâce aux matériaux de récupération qu’elle ramasse dans les détritus pour nourrir Maria. Mais contre toute attente, sa fille tombe enceinte et elle ne voudrait pas la faire subir le même sort. Elle décide donc contre vents et marées en bravant toutes les interdictions de faire avorter sa fille.
Les prises de vues sont irrépréhensibles, associées au décor et aux costumes qui donnent une valeur forte et entreprenante de la femme en Afrique. Bien que la mère de Maria vit décemment en transformant les outils de récupération en objets décoratifs ; elle ne perd aucun espoir quant à la réussite sociale de sa fille. Elle a été confronté à plusieurs menaces tant par la religion, la justice et même la police. Elle a eu surtout l’élan de solidarité des femmes pour porter haut, mais discrètement son combat.
Le réalisateur Mahamat-Saleh Haroun voudrait à travers ce film sensibiliser les autorités tchadiennes et même celles de l’occident sur l’avortement et tous ses corolaires. Les principaux interprètes de ce projet «Lingui» (Liens sacrés), étaient également face à la traditionnelle conférence de presse pour davantage approfondir, certes le débat ; mais s’intéresser davantage à l’intérêt que revêt ce film.
Mahamat n’a pas voulu néanmoins approfondir certains sujets liés au cinéma en Afrique et à la situation politique qui prévaut dans son pays. Auteur d’un frappant documentaire sur Hussein Habré «La tragédie tchadienne» sortie en 2015, un journaliste a souhaité qu’il se prononce sur les tristes évènements survenus récemment au Tchad, le réalisateur est resté motus et bouche cousue.

Quant au regard qu’il porte sur le cinéma africain, notamment la place qu’il peut avoir dans ce marché mondial concurrentiel avec la fermeture des salles africaines… «Qu’est-ce que vous voulez que je vous dise…on est des cinéastes isolés. Je ne peux rien vous dire de plus sur ce que les SEMBENE OUSMANE et autres ont dit ? Chacun fait son cinéma en Afrique…La salle de cinéma Le Normandie au Tchad sera rouverte, nous sommes là-dessus…bon bref, s’il faut que j’évoque ce sujet ici, nous allons passer des heures…. » A-t-il conclut.
Hervé David HONLA