Entretien vérité avec la protégée d’Oumou sanagré
De son vrai nom Guira Mamounata, c’est artistite chanteuse/interprète/auteure qui a fait ces premiers pas dans la musique il y a plus de vingt ans. Dans l’orchestre «Diamana» d’Abdoulaye Cissé (l’Homme à la guitare) qu’elle a découvert ses talents pluridisciplinaire : Danse, théâtre, mannequinant, chant, chœur etc. Sa particularité est son timbre vocal et c’est une férue de la scène et notamment de la musique live. Elle a évolué dans plusieurs groupes tant au Burkina qu’en Europe. Elle s’est également illustrée dans plusieurs concours (Métronome vacances 20007 (2è). 1er Prix SNC 2008 dans la catégorie «Vedette de la chanson moderne» etc.
L’une de ses forces également, c’est sa participation dans plusieurs albums des artistes tels que Zêdess, Ibrahim Keita, Georges Ouédraogo, Amy Koita, Aicha Koné, Oumou Sangaré, Manu Dibango, Bally Spinto, Cheick Tidiane Seck etc.
Aujourd’hui ; elle réside à Paris et bourlingue à travers le monde sur des scènes huppées en solo, dans les groupes et dans les créations.
Présente à Ouagadougou pour des rencontres professionnelles et familiales, la pandémie du Covid-19 a prolongé son séjour. Oxygene Mag est allé à sa rencontre, le 03 avril 2020, pour un entretien «tous azimuts»
Tu as toujours rêvé de passer de longs moments chez toi au Burkina Faso, cette crise sanitaire du Coronavirus te donne l’occasion…
Ce sont les vacances obligatoires pour moi. Personnellement, je peux dire que je suis heureuse dans un sens, car je me retrouve en famille bien qu’étant confiné chez moi. Je suis présente avec mon enfant et toute ma famille de souche. Mon fils est plutôt heureux ici et en liberté, contrairement quand il est à Paris. Car là-bas, on allait être enfermé et même pire qu’ici dans des appartements pas toujours adéquats. Malgré que c’est triste pour le monde, c’est compliqué pour la santé, c’est compliqué pour les activités culturelles et tout autre…
Ton dernier séjour au Burkina Faso remonte à quand ?
C’était il y a deux ans dans le cadre d’une ressource familiale et surtout pour me recharger les batteries. La famille est très importante pour mon équilibre, c’est la raison pour laquelle, j’y retourne souvent. J’avais eu aussi la chance de jouer à l’Institut Français de Ouagadougou.
Le MASA en Côte d’Ivoire te découvre et t’invite cette année. Pourquoi pas le Burkina ?
La question reste ouverte. J’aimerai bien avoir la réponse. Mais bon…il y a des choses qui se peaufinent à l’horizon. Peut-être que les promoteurs burkinabè avaient besoin de voir mon spectacle au MASA pour se prononcer… Le MASA a permis que beaucoup de gens me voient en prestation en Afrique, donc il y a beaucoup de choses qui sont en train de se fignoler, je ne peux pas me prononcer maintenant.

Le Burkina Faso c’est ton pays et nous sommes censés te connaître. Est-ce qu’on avait besoin d’abord que tu fasses tes preuves au MASA ?
Comme on le dit souvent, nul n’est prophète chez soi. Le pays me connaissait certes, il savait ce que je suis, peut-être que l’occasion ne s’était pas présentée. Peut-être aussi qu’ils attendaient que l’autre partie de l’Afrique me fasse appel. Comme je ne vis pas en Afrique, ce n’est pas aussi évident selon eux, de me faire venir sur le continent pour des spectacles. Bof…franchement, je ne saurais vraiment quoi vous répondre par rapport à cette question. L’envie ne me manque pas de venir jouer au Burkina Faso, devant mon public.
Est-ce que c’est parce que nous sommes friands de ce qui vient d’ailleurs ?
Je dirais plutôt que le burkinabè a de la peine à accepter sa propre musique. Nous sommes entourés, en plus de beaucoup de cultures étant en plus enclavé, ce n’est pas évident. On a souvent tendance à oublier que nous avons notre propre culture aussi. Je dirais aux promoteurs et animateurs de mettre en exergue la musique burkinabè tout en proposant aussi aux mélomanes burkinabè nos valeurs.

Qu’est ce qui t’a véritablement marqué lors de ton séjour au MASA ?
Je veux être poli. C’est l’organisation qui était tout de même compliquée. Sinon ; j’ai fait deux supers spectacles malgré les couacs organisationnels. On nous a bien pris en charge et nous sommes passés à l’heure prévue et vraiment, je leur tire mon chapeau. Dans l’ensemble c’était beaucoup plus positif.
Finalement, qu’est ce qui n’a donc pas marché ?
Le spectacle à l’esplanade, on a beaucoup eu trop de retard pour la balance. Lors des deux spectacles, on a eu des retards lors des séances de balance…l’organisation était tout de même assez difficile. On n’arrivait pas à trouver les responsables de certaines commissions. On ne savait pas, qui faisait quoi ? A qui doit-on s’adresser ? Etc.
On te connaît très exigeante en matière d’organisation. Est-ce que tu n’en demandais pas un peu trop aux organisateurs ?
(Rires)…C’est surtout ça ! Dans tout ce qu’on fait, il faut être exigeant. On ne peut pas demander l’exigence aux gens si on ne l’est pas soi-même. Peut-être c’est mon mauvais caractère et ça m’a toujours porté fruit. C’est aussi ça qui fait que l’Europe aussi me respecte et j’aimerais que ça soit le cas partout. Je n’aimerai pas qu’on dise que c’est l’Afrique et nous allons toujours être laxistes. Pourtant, nous allons les armes et les atouts, les compétences, le personnel pour bien réussir. Ce que je n’arrive pas à comprendre, c’est que nous avons tout ça sur place à moindre coût et malheureusement, nous n’arrivons pas à bien le faire avec professionnalisme. Personnellement, c’est quelque chose qui m’agace, je l’avoue ! Il ne faut pas qu’on dise que c’est l’Afrique et qu’on doit s’attendre à ce que ça soit mal fait. Il est où ce visage positif de l’Afrique ? Il ne faut pas que ce soit les africains eux-mêmes qui parlent mal de l’Afrique.

On ne peut plus parler de Kandy Guira, sans évoquer Oumou Sangaré. Peut-on dire que c’est grâce à elle que tu es devenue ce que tu es dans le monde ?
Oumou Sangaré a contribué beaucoup dans ma carrière. Pas seulement elle. Il y a Cheick Tidiane Seck qui a joué un grand rôle dans ma carrière. C’est lui qui a favorisé toutes ces rencontres que je fais aujourd’hui. Manu Dibango aussi, paix à son âme : j’ai eu aussi l’occasion de partager la scène avec lui. Malheureusement, nous sommes dans une période où on ne peut pas lui rendre hommage comme il se doit. On va se rattraper quand les bons moments viendront. Pour moi, c’est tous ces gens-là qui ont participé à la construction de ma carrière.
Quand on voit Kandy Guira sur les médias internationaux, les spectacles en Europe, Amérique, Afrique. Peut-on dire que tu fais partie des mieux rémunérés au Bureau Burkinabè de Droit d’Auteur (BBDA) ?
(Rires aux éclats)…Je rigole parce que je viens d’y passer justement. (Rires…Rire…)…je n’ai pas envie de répondre à cette question parce que… (Rires…)…je ne sais pas quoi dire en fait…
Pourquoi ?
(Rires)…honnêtement, je ne sais pas comment répondre à ta question… (Rires)…
…Mais on voit tout de même Kandy Guira partout. Ou alors vos droits sont gérés par la SACEM en France ?
Non, normalement la Sacem s’occupe du Monde et l’Afrique est toujours dans les mains du BBDA. Comme je n’ai pas encore eu l’occasion de croiser le Directeur, j’ai pris un rendez-vous avec lui…Je pense que la faute aussi me reviens. Il y a certaines choses que je ne comprends pas parce que je ne me suis pas approché au BBDA pour savoir comment je pouvais gérer mes droits en n’étant pas là. Par exemple, je pouvais avoir des contacts avec lesquels, je pouvais avoir des échanges depuis l’Europe, ce que j’ignorais….
…Donc votre argent est égaré ?
Non…non…Certainement il est là. Comme je n’ai pas perçu, il faut tout simplement que je me conforme aux règles et tout me reviendra dans l’ordre. Mais j’aimerai dire à tous les radios, télévisions etc., de continuer à payer les droits. Sans eux, on n’aura rien ! C’est bien beau d’aller au BBDA, mais si on reçoit des miettes, ce n’est pas la peine de mettre ça sur le dos de la pauvre dame qui est là-bas.

Les promoteurs de spectacles au Burkina Faso ont parfois envie de vous inviter en spectacles, mais vous êtes surbookés. Est-ce que ce n’est pas aussi un handicap, le fait de ne pas être disponible et présent au Faso ?
Non ce n’est pas un handicap. Les moments où on avait besoin de moi, on m’a sollicité très tard. Mon calendrier est rempli une année à l’avance. Le plus court, c’est six mois à l’avance. Je voudrais dire aux promoteurs de s’y prendre à temps, minimum six mois à l’avance. J’ai beaucoup de projets en France ; j’ai mon projet solo, j’accompagne aussi d’autres projets dans lesquels je bouge avec les «Amazones d’Afrique », je suis avec Oumou Sangaré etc. Il faut juste me prévenir à l’avance mais à la dernière minute c’est compliqué. Il faut aussi un minimum de cachet et de date qui peut me permettre de quitter la France…
Ton cachet c’est combien ?
L’Afrique possède des moyens pour nous inviter. Il faudrait juste mettre le budget qu’il faut….
L’Afrique ce n’est pas l’Europe…les promoteurs burkinabè se battent avec les moyens de bord sans sponsor. Mais toi tu viens tout de même chez toi…
Moi ça ne me dérangeait pas de venir jouer gratuitement. Tout dépend de l’organisation et je suis une personne de principe et de conviction. Si dans les principes, les choses se passent comme il faut, avec respect, car c’est un métier pour moi et je vis de ça, on ne peut pas me dire de venir jouer parce que c’est chez moi. Je ne dois rien à personne ! Pour moi, c’est le respect du métier de l’autre qui est important. On ne peut appeler un artiste de venir soutenir le métier de l’autre sans respecter le tien. Maintenant quand tu donnes tes conditions, on dit que tu exagères ; qu’on t’a vu ici-là etc. C’est aussi mon droit de venir ou de ne pas venir…voilà !
Hervé David HONLA