L’union devrait faire la force
C’est la région du Centre-Est qui a accueilli du 24 au 26 octobre 2019 la quatrième Rentrée du Droit d’Auteur (RDA) sur le thème «Droit d’auteur et valorisation des contenus nationaux ». Au-delà de la forte mobilisation des autorités locales coutumières, politiques et culturelles, une impressionnante délégation était également venue de l’Afrique de l’Ouest et la France. Notamment, les bureaux des droits d’auteur de la Côte d’Ivoire, du Mali, du Niger et du Sénégal, des structures comme la CERAV/Afrique, la SACEM, l’OIF et l’UEMOA. A l’occasion de la «Nuit du Droit d’Auteur» qui a marqué la clôture de cette édition, c’est le cinéaste Tahirou Tasséré Ouédraogo et l’artiste Floby qui ont été distingué respectivement meilleur titulaire de droit au BBDA dans la catégorie audiovisuel et catégorie musique.
Les réflexions de cette quatrième rentrée tournaient autour du contenu que l’on pourrait attribuer aux œuvres nationales. Son imprécision suscite beaucoup de confusions surtout avec l’envahissement à tout-venant, du numérique. L’importation des produits de l’occident associés aux comportements, dénature la quintessence même des valeurs culturelles locales. Pour véritablement faire face à ce flux de contenus culturels et artistiques occidentaux, la question de droit d’auteur doit être abordée avec acuité et surtout de façon collégiale.

La faiblesse de la culture du droit d’auteur constitue l’un des plus gros handicaps pour faire face à cette avalanche qui se prépare. Par conséquent, des actions audacieuses doivent être menées. D’où l’organisation de ces panels. De plus en plus, certains pays africains ont commencé à percevoir l’importance de la culture. Au Burkina Faso par exemple, en termes d’indice de développement au niveau du PNDS, la culture occupe un pilier important. Au niveau de la vision politique, les changements également sont en train d’être opérés. Les créateurs et surtout les acteurs culturels doivent développer des stratégies pour être en harmonie avec cette vision politique qui se met en place.
Le problème technique, sécuritaire et même pédagogique se pose malheureusement en Afrique de l’Ouest. Les bureaux de Droit d’Auteur, éprouvent d’énormes difficultés à identifier et à suivre l’utilisation des œuvres des créateurs. Avec le numérique ; ça devient encore plus compliqué. L’exactitude par exemple des clés de répartition est indéterminée. Pour se faire, l’ensemble des organismes de gestion collective présents à cette RDA on comprit qu’ils doivent mutualiser leurs actions. Le cas de la copie privée par exemple : Le Burkina Faso est le seul pays dans l’espace UEMOA qui applique cette donne en relayant cette entité avec d’autres pays de l’espace UEMOA, afin que cette pratique soit implémentée. Selon Wahabou Barra DG du BBDA, les contenus nationaux et la question du droit d’auteur sont intimement liés voire complémentaires. «En valorisant nos identités culturelles, nous faisons la promotion du droit d’auteur. Avec le basculement du numérique, nous sommes envahis par des programmes qui sont conçus à l’Occident avec des comportements qui contrastent avec les mœurs de nos populations. Ces programmes sont en rupture totale avec nos systèmes de cohésion, de solidarité et de construction de nos richesses», précise-t-il. Le sketch sur l’envahissement des télé-novelas présenté lors de la Nuit du Droit d’Auteur a été significatif.
Au cours des échanges lors des différents panels à Tenkodogo, il était question de discuter avec les personnes ressources et «gérants» des droits des créateurs, sur des partages de bonnes pratiques des différents organismes de gestion collectives. Le développement du droit d’auteur et l’intégration en Afrique avec les actions de l’OIF ont été abordés par le DG CERAV Afrique (Centre Régional pour la promotion des Arts Vivants) Michel Saba et le secrétaire général du BBDA, Moise Kohoun. Le précepte fondamental qui est ressorti de tous ces échanges, c’est la synergie d’action des communautés africaines à promouvoir les Arts vivants. Le responsable Afrique de la SACEM, Akotchayé Okio a précisé lors des propositions finales que «Pour les sociétés africaines, il y a aussi le problème de moyens qui s’impose. En mutualisant les moyens au niveau africain et en travaillant en bonne intelligence avec les structures internationales qui existent comme la CISAC (Confédération Internationale des Sociétés d’Auteurs et de Compositeurs) ou l’OMPI (l’Organisation Mondiale de la Propriété Intellectuelle), ainsi que les sociétés sœurs comme nous, je pense que le fossé pourrait être comblé progressivement».
Une quatrième édition qui a vu la participation des créateurs venus des quatre coins du pays. Ces derniers ; malgré leur assiduité aux travaux, ils n’ont pas hésité à faire entendre leur opinion.
“En valorisant nos identités culturelles, nous faisons la promotion du droit d’auteur” affirme Walib Bara DG du BBDA
Néanmoins, d’autres actions de proximité sur le terrain pourraient être menées pour davantage inculquer la question du droit d’auteur aux populations. Privilégier par exemple une foire ou un espace de mini festival où exclusivement les consommateurs (maquis, artistes, DJ, plasticiens, écrivains…) exposeront leurs œuvres au public. En ce moment, l’équipe d’organisation défilerait tous les soirs sur le podium pour évoquer en français facile, les questions de droit d’auteur au public de consommateurs usagers. Entre prestations d’artistes membres du BBDA et animation BBDA, ces consommateurs passifs seront mieux outillés. Y compris les responsables des débits de boissons présents sur le site avec leur stand, DJ et autres. La question de droit d’auteur, tout le monde doit être concerné. Tous les matins, ce sont les panels intellectuels et les après-midi, place est ouverte au public lambda sur le site d’animation. Cela mettra en contribution tous les acteurs des différentes filières intervenants directement sur la question du Droit d’auteur.
Hervé David HONLA