Bibich Sérénité: «Mon nom circule, mais je transpire!»
Entretiens

Bibich Sérénité: «Mon nom circule, mais je transpire!»

Surnommé le «Muezzin du Zouglou», Bibich Sérénité de son nom à l’état civil Jean Baptiste DIGBO vient de mettre sur la place publique, son single «Décision». C’est à Abidjan en Côte d’Ivoire qu’il a décidé de lancer la campagne promotionnelle. De retour au Faso, il nous dresse le bilan de son périple et l’environnement artistique qui prévaut en ce moment dans sa carrière.

Quel bilan faites-vous de votre séjour dans votre pays natal la Côte d’Ivoire ?

Je tiens à saluer avec votre approbation, mes fans et les mélomanes qui aiment la bonne musique, notamment le Zouglou. Je suis bien de retour au Faso, après deux mois passés à Abidjan où tout s’est bien passé. Le bilan est largement satisfaisant. D’autant plus que j’ai fait beaucoup d’émissions de vacances, des entretiens TV et radio et des spectacles.

L’objectif était aussi de promouvoir votre nouveau single. Qu’en est-il exactement ?

Le single intitulé «Décision» a été enregistré à Abidjan en avril 2018 avec l’arrangeur Rochatur. J’ai essayé de bosser avec lui et ça été un coup d’essai qui fut un coup de maître. Pour la simple raison que, les ivoiriens ont bien accueilli cette œuvre…

Pourquoi le choix de la Côte-d’Ivoire ?
J’ai choisi la Côte-d’Ivoire pour d’abord enregistrer ce tube, car je réside au Burkina Faso depuis 2012. Depuis lors, c’est avec les arrangeurs burkinabè que je travaille. La preuve en est que, j’ai travaillé avec Kevinson, Evariste Compaoré du groupe Dynamique Duo et c’est d’ailleurs avec lui que j’ai fait l’album «Ouagazouglou » qui m’a révélé au peuple Burkinabè. Je me suis dis également qu’il ne faut pas rester dans la monotonie. J’ai voulu être polyvalent en dispersant mes énergies et mes compétences. C’est la raison pour laquelle, je me suis rendu à Abidjan. Bref j’ai voulu changer la coloration de mon œuvre, d’où mon séjour en Côte d’Ivoire en Avril et ma promo pendant ces vacances qui viennent de s’achever. Pour revenir à la promo, certes, nous savons que le Zouglou monte en puissance au Burkina Faso, j’en profite pour saluer les précurseurs, tels que : Campus Ambiance, M’TY la Merveille…mais à Abidjan c’est une porte d’entrée pour la promotion au niveau continental. Car cette ville est devenue la plaque tournante de la musique africaine. Personnellement, j’aime me lancer dans les challenges et mon séjour à Abidjan en était un. Nos artistes comme Imilo Lechanceux ou encore Bebeto Bongo vont régulièrement à Abidjan pour présenter leurs œuvres et ça marche. Moi également, j’ai voulu emboiter le pas des autres. Comme j’aime les exclusivités, c’est pour cette raison que je suis parti à Abidjan. Le refrain de cette chanson inspire plus d’un ivoirien et la preuve ; j’ai bourlingué dans presque toutes les discothèques. J’ai donc confié ce single aux ivoiriens en leur disant de s’en approprier.

Pourquoi avoir choisi de venir vous installer au Burkina Faso pour lancer votre Zouglou, quand on sait que son origine et sa promo se font en Côte d’Ivoire ?
Pendant mon séjour ici au Burkina Faso, je vais apprendre à parler et à chanter en mooré et d’autres langues nationales. Je compte également promouvoir le warba à travers une chanson que je réaliserai en featuring avec un artiste du terroir pour aller la proposer aux ivoiriens. Par ailleurs, avant que je ne vienne au Faso, j’avais déjà des échos qui affirmaient que le Zouglou se porte à merveille ici au Burkina Faso. Il a fallu que je vienne ici, pour le constater. En effet, le Burkina Faso est le second pays consommateur du Zouglou dans le monde. Je l’affirme en connaissance de cause car le dernier tour que le groupe Magic System a fait à l’occasion de leurs 20 ans de carrière, c’est ici au Burkina Faso, qu’il y a eu une démonstration de force. Le zouglou est consommé et c’est pour cela que nous sommes venus renforcer la grande famille zougloutique. Bref nous cherchons à «burkindisé» notre zouglou. La preuve ; quand je suis arrivé, j’ai sorti et développé mon «Ouagazouglou» et les burkinabè s’en sont appropriés.

Selon vous, pourquoi l’on ne constate pas cet engouement de la musique burkinabè chez nous ?

Tout est question de décision et d’appropriation de valeurs. C’est d’ailleurs mon slogan à moi. En ce qui me concerne, peut-être que je vais choquer certaines personnes… Nous vivons ici dans un système de dogme et de chefferie. Le «Naaba», le respect, la soumission etc. Même quand les artistes sont en studio où quand ils préparent leurs compositions, ils pensent à leur chef et ils tiennent compte de leurs instructions. Finalement ils ont les mains liées quand ils composent, car il faut penser aux «Naaba». Ils veulent forcément chanter en mooré pour se faire distinguer et par conséquent, j’estime que le Burkinabè n’a pas encore retrouvé sa véritable identité musicale qui colle à lui. Il y a plusieurs genres disparates, mais il n’y a pas de rythme propre au Faso. Je pense néanmoins que ça viendra car nous avons des artistes entreprenants comme Imilo Lechanceux, Floby, Dez Altino…ils prendront conscience et sauront que la culture burkinabè compte sur eux également. Il a fallu que la Côte d’Ivoire soit en concurrence avec les congolais pour que les imminentes personnes comme Georges Aboke, Billé Didier, You Fazer réfléchissent pour mettre en place le Zouglou qui est devenu par la suite, l’identité culturelle ivoirienne.

Comment se déroulent vos prestations ici au Faso ? Avez-vous régulièrement des scènes ?

C’est vrai que le Zouglou est consommé au Burkina, mais j’avoue que, personnellement, les difficultés d’avoir des scènes existent. En termes de cachets, pour être franc, on ne nous gère pas bien ! Même entre les artistes, le traitement est différent. Pendant que nous sommes sur la même scène, il y a des artistes qui touchent 500.000 voire 700.000 FCFA pendant ce temps, moi je suis à 100.000 FCFA voire moins que ça. D’abord les «Gombos» se font rares et quand on attrape, ce sont des cachets dérisoires…

…Pourtant en suivant vos chansons, on a l’impression que vous battez le record de parrains et mécènes…

…non…non…je les cite dans mes chansons mais c’est le zouglou ! Nous ne sommes pas des griots des temps modernes, mais c’est ça la nouvelle génération…

…Ces mécènes-là vous soutiennent au moins financièrement à ce que je sache ?

En toute sincérité, je ne pense pas…Peut-être que c’est maintenant que les choses vont changer. Sinon, pour être vrai : certes mon nom et mes œuvres circulent un peu partout dans la capitale, mais je ne m’en sort pas. On dit souvent que, quelque soit la situation sociale d’une artiste, il ne faut pas qu’il affiche sa pitié aux yeux des gens et de ses fans. Imaginez-vous qu’au stade où je suis, je n’ai même pas un moyen de déplacement encore moins un vélo. Ce n’est pas intéressant ! Pourtant certaines personnes m’encouragent verbalement et psychologiquement mais il n’y a pas de concrétisation. J’en profite pour lancer un appel à ces mécènes-là…

Pourtant d’aucuns disent qu’il y a un parti politique influent dans ce pays, qui vous soutient…

Parlant du parti politique qui me soutient…peut-être que ces «Vieux père» aiment bien ce que je fais. En réalité, je n’ai pas de parti politique qui me soutient. Quand j’appartenais au groupe les «Sereins», il y a eu des hommes politiques qui ont aimé ce qu’on fait et par conséquent, lors de leurs meetings ils nous faisaient appel. Mais individuellement, ces personnes ne m’ont pas encore pris par le bras pour m’accompagner. Comme vous également, j’entends dans les coulisses, que certaines autorités admirent mes chansons, mais elles ne m’ont pas encore approché et moi non plus également. Partout où j’ai été invité, les gens m’ont toujours marqué leur affection par rapport à ma musique. Si ces personnes veulent vraiment m’aider, ce single «Décision » est le bienvenu. Ils peuvent se l’approprier.

Le fait que vous êtes vous-même administrateur de votre carrière artistique, n’est-ce pas un sérieux handicap ?

A un certain moment de ma vie, je vais écrire un livre qui s’intitulera «On m’a rendu manager». Ce que j’ai remarqué au Burkina Faso et partout d’ailleurs, les gens attendent que l’artiste lutte seul et quand il commence à connaître la gloire, ils reviennent s’afficher pour endosser votre succès affirmant qu’ils vont vous accompagner. Un monsieur m’avait donné le contact d’un grand manager de ce pays en me disant que : «dis lui que tu viens de ma part». Je lui ai appelé en vain. Il m’a tourné en bourrique, jusqu’au jour où je vous parle, cette personne ne m’a jamais reçu. Ce n’est pas pour cette raison que je vais baisser les bras. Moi Bibich Sérénité, je suis mon propre fan ! Parfois, je vais dans certaines manifestations, on me refoule, mais malgré cela, je reste déterminé. Néanmoins, je vous rassure ce soir, que je possède un staff. Mon manager s’appelle Maka Manadja, c’est un jeune frère dynamique qui fait du bon boulot. Ceux qui se disent grand managers en ce moment, possèdent par contre, beaucoup de lacunes. J’aimerais que l’on me présente de nos jours, un manager qui a pris un artiste dans l’anonymat et le façonner pour en faire une véritable célébrité…

Quelle est la suite que vous donnez à ce single «Décision» que vous venez de mettre sur la place publique ?
Je voudrais, avec votre permission revenir sur une de vos questions précédentes concernant les mécènes. En effet, dans la vie, il faut être reconnaissant. Il faut remercier les bienfaiteurs. Je tiens à remercier de vive voix ces personnes qui me passent un coup de fil pour se rassurer de l’état de ma santé et de ma carrière. La dernière fois, j’ai fait une grosse de citer quelques noms en oubliant les autres, cela a failli causer des problèmes. Je pense que ces personnes-là se reconnaitront et je leur demande de redoubler d’efforts car le poussin est en train de grandir. Donc le poussin est en train devenir un coq. Pour la suite, j’informe à toute la population que le clip «Décision» sera réalisé en mois d’octobre. J’ai décidé de le réaliser dans le Sanguié. Parce que le peuple Gourunssi m’a adopté. La preuve en est que, quand il y a un moindre évènement dans cette cité, j’ai toujours été convié. Je voudrais leur rendre hommage. Comme mon ami Cyrile Bayala des Etalons est également issu du Sanguié, je voudrais vraiment leur dire merci à travers ce clip. Pour tous ceux qui veulent participer au tournage de ce clip, ils peuvent prendre attache au numéro suivant : 57.06.02.02.
Jabbar !

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