Travail ardu pour un journaliste culturel d’égrener en 15 minutes, le parcours élogieux de ce personnage immensément cultivé. Certains, commencent même déjà à se demander, pourquoi on ne lui accorde pas assez de crédit quant à ses idées pragmatiques en matière de développement culturel de notre pays ?
Porte étendard du cinéma africain en Europe, et icône incontestable du 7è art, il ne passe pas certainement inaperçue dans son pays (pour les férus de la culture). Mais son expertise n’est pas sollicitée dans son pays, contrairement en Europe et en Amerique.
Heureusement que l’Académie des SOTIGUI est consciente que les SOTIGUI AWARDS, ne pourront pas valoriser nos acteurs africains et de la diaspora, sans s’appuyer sur son talent et son carnet d’adresse.
Cet auguste personnage au corps de rugby, crève les écrans depuis déjà 20 ans. Repéré par le Théâtre National de Norvège où il s’était installé pendant 23 ans, il n’a jamais pour autant abandonner son pays, encore moins le théâtre et le cinéma burkinabè. Bien au contraire, il aurait même décidé de revenir au Faso s’installer et exécuter ses projets. D’aucuns diront que : pour un «moaga» qui a séjourné pendant 23 ans au cœur de la bourgeoisie du pays le plus riche du monde en l’occurrence la Norvège, décider de revenir s’installer à «karpala» au Faso, c’est une aliénation.
Il continue donc son «sacerdoce» auprès des comédiens burkinabè dans le but de fédérer leur savoir-faire avec ceux des Pays-Bas, de la France, de la Norvège, de la Suède, de la Belgique…
Animé par ce goût du dialogue, de la causerie et du partage, notre «Sankara du 7è Art» doit son succès mondial, grâce à son talent et sa générosité. Voyez-vous; Issaka a ébloui de nombreux plateaux de tournage dont les films, ont été des best-sellers. On peut citer sans en abuser «The Invader » du célèbre Nicolas Provost., «Samba» d’Olivier Nakache et Eric Toledano où il a joué aux côtés de la personnalité la plus aimée des français Omar Sy. Ou encore «The paradise suite» de Joos Van Ginkel. Presque tous ces films évoquent la question des migrations. Ce qui lui a d’ailleurs valu la consécration, en juin 2017 au Nederlands Film Festival pour son rôle dans «The paradise suite». Détrompez-vous, ce n’est pas la seule distinction qu’il a déjà reçu dans sa carrière.
Depuis 2004 avec le court métrage «Exoticore» du belge Nicolas Provost où il avait reçu le prix de la meilleure interprétation masculine au Festival du film de Namur, jusqu’à ce jour, Issaka Sawadogo a glané 11 prix lors des festivals internationaux. De son premier film «Nurse» en 2000, jusqu’à la toute récente série «Maroni, les fantômes du fleuve» d’Aurelien Molas et le tout dernier de Semfilms “La République des Corrompus”, celui qu’on a surnommé le «Maire de Guyane», catapulte avec 22 séries TV, longs et courts métrages.
En effet, la série «Guyane» a été très médiatisé dans le monde, grâce à la bonne humeur et l’estime que l’acteur burkinabè entretenait tant sur le plateau, qu’avec la population guyanaise. Sa carrure et sa haute stature lui ont toujours assigné des rôles gargantuesques. Par exemple ; dans «Guyane», une série de CANAL+, il joue le personnage de Louis, le bras droit d’un chercheur d’or qui ne rit jamais et toujours nerveux. Dans «Maroni», une série présentée au Festival de la fiction TV de la Rochelle, il joue le rôle du commissaire Koda. Un homme fort et un flic intraitable tentant de garder son collègue loin des gouffres où l’entraine son enquête.
Il a donc été surnommé «Maire de Guyane » pour avoir côtoyé toutes les couches sociales dans les Antilles françaises pour les besoins de la série TV. Issaka aura presque persuadé cette population à mener des actions fortes de développement. Car, cette région de la planète serait riche, à la fois par ses hommes et ses «potentialités» naturelles.
L’année dernière en 2017, il avait été désigné Membre du jury longs métrages au FIF (Festival International du Film Francophone de Namur). Une reconnaissance méritée qui devrait avoir des répercussions au FESPACO. Le voir comme membre du jury au cinquantenaire du FESPACO, ne serait pas une utopie, bien au contraire.
Tout en avouant qu’il a eu ce succès mondial grâce au film de Marion Hânsel «Si le vent soulève les sables», il est aujourd’hui animé par la concrétisation de ses projets porteurs au Burkina Faso. Notamment, la création d’un «Festival de séries africaines » qui sera rattaché au FESPACO. En dehors donc du CITO (Carrefour International du Théâtre de Ouagadougou) qu’il a fondé en 1996, tout comme d’autres initiatives tant culturelles que sociales telles que le réseau KANGOUROU en 2011 (une école maternelle et primaire qui met l’accent sur l’éducation à la culture comme matière prépondérante), le flic de «Maroni» ne voudrait pas s’arrêter là. L’ambassadeur des Sotigui vise plutôt loin ! Le vœu de fonder une Académie des Beaux-Arts au Burkina Faso, serait son plus grand désir. C’est la raison pour laquelle, il a toujours ardemment soutenu cette thèse qui consiste à introduire dès l’initiation à l’école, la formation artistique générale.
Avouons de façon générale que le cinéma a évolué car les modes de consommation ont changé. Son offre s’est modifiée. Il s’est adapté tant au niveau de la production que de l’exploitation. Hors quelques pays du Maghreb et l’Afrique du Sud, le continent africain est demeuré à l’écart des adaptations commerciales et technologiques. Les dernières salles qui ferment, sont toutes de la première génération. Pourtant, les causes de tout cela ont des noms : l’Absence de professionnalisme, le manque de compétence et de savoir-faire, le copinage peu éclairé auxquels s’ajoutent un manque de rigueur de gestion, mais aussi, évidemment, la piraterie, la corruption, la démission de l’Etat, l’absence de vraie réglementation adaptée aux nouvelles technologies et de moyens de son application.
Cette révolution amorcée par les principaux concernés, notamment les acteurs, les producteurs, les promoteurs et l’ensemble des métiers du cinéma, ne peut qu’être effective grâce aux figures de proue comme Issaka Sawadogo, Apolline Traoré, Adama Roamba… qui méritent le soutien inconditionnel de l’Etat.
Il n’y a pas de raison qu’ils soient honorés ailleurs sous les feux des projecteurs et délaissés chez eux.
LECHAT !