Suite à la publication du Directeur Général du Bureau Burkinabè de Droit d’Auteur (BBDA), Walib Bara sur son mur facebook, qui se posait la question de savoir: «Comment orienter les acteurs du cinéma vers des mécanismes definancements privés structurants?» Oxygenemag.info énonce quelques propositions.
Vous savez ; le privé n’est pas seulement la solution. Déjà, ce privé a beaucoup de priorités. Ils (les acteurs privés) possèdent leurs activités économiques qui font partie de leurs priorités et encore, faudrait-il que le cinéma les intéresse et que cela soit rentable.
Certains interpellent par exemple les banques. L’implication des banques peut être importante, mais aussi variable. Car le risque présenté par l’industrie cinématographique est élevé. Chaque production est un nouveau pari, et il n’y a pas d’actifs pour garantir le prêt. C’est pour ça que toutes les banques n’acceptent pas ce risque. Celles qui décident de financer des productions audiovisuelles fixent les conditions du prêt selon des critères: Par exemple avec la présence des investisseurs, les producteurs doivent être eux-mêmes présents. Ils exigent la présence d’un réalisateur connu et même des acteurs qui possèdent des comptes bancaires.
Je me souviens également que lors du FESPACO 2011, un appel avait été lancé par la FEPACI à Abdou Diouf, ex Secrétaire Général de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), pour qu’il accepte de convaincre les présidents africains de mettre en place un Fonds panafricain du cinéma et de la télévision. Certains experts ont balayé ce projet du revers de la main et j’étais d’avis avec eux. C’était de l’utopie ! Ce fonds, comptait sur la participation des Etats africains.
Pourtant je connais la plupart des pays africains qui n’ont même pas mis l’argent dans leur propre cinéma, ils n’en ont pas fait une priorité. Pourquoi voulez-vous qu’ils mettent de l’argent dans un fonds qui est destiné au cinéma des autres ? Ne créons pas un pseudo AIR AFRIQUE, où chaque Etat viendra piller à sa guise.
Le constat que dresse Walib Barra concernant ce modèle économique qui se repose sur les subventions de l’Etat avec une intervention quasi inexistante du secteur privé est certes à décrier, mais on peut s’orienter vers d’autres options :
Je prends le cas des nouvelles formes de diffuseurs d’images, y compris Internet, les téléphones mobiles etc. Pourquoi ne pas créer une loi à partir de ce marché audiovisuel global ? C’est-à-dire, à partir de tout ce qui permet de diffuser des films chez nous.
C’est ce que fait la France. Vous savez, que la France a développé le système de soutien au cinéma le plus élaboré au monde. Après la guerre, c’est de Gaulle lui-même qui a dit : on ne va pas laisser l’argent des spectateurs français quitter la France et aller financer Hollywood. Parce qu’il y avait une masse énorme de films hollywoodiens qui étaient bloqués du temps de l’occupation nazie, qui a déferlé sur la France. Les gens ne voyaient que ça, des westerns… Les lois datent de de Gaulle, où 11 %, je crois, des recettes des salles allaient au fonds de financement du cinéma français, géré par le Centre National du Cinéma Français. Et c’est ce fonds qui a financé les films de plusieurs réalisateurs français.
Et puis, en 1981, quand Mitterrand est arrivé au pouvoir, Jack Lang, Premier ministre de la Culture de Mitterrand, avait dit : « Tiens, les gens ne voient plus seulement les films en salle. Ils regardent la télévision ». Donc, il a proposé une nouvelle loi : les télévisions françaises sont obligées de mettre 6 % de leur chiffre d’affaires dans le financement des films.
Donc à mon avis, au lieu de simplement attendre la charité du Nord ou des subventions de l’Etat, l’idée, c’est de poursuivre avec cet esprit d’autofinancement. Les temps ont changé. Faisons comme la France qui a adapté le financement de ses films nationaux à partir de toutes les ressources audiovisuelles nouvelles, internet et tout ça. C’est la France qui a également fait de nouvelles lois où, pour que tous les contributeurs, les diffuseurs d’images, y compris Internet, les téléphonies mobiles, financent aujourd’hui le cinéma, les films et les téléfilms français. C’est la raison pour laquelle vous voyez par exemple CANAL+ pour ne citer que celle-là, être omniprésente dans le cinéma français.
En toute simplicité, je dirais que : A partir d’un marché audiovisuel global, c’est-à-dire à partir de tout ce qui permet de diffuser des films chez nous. Ne demande pas à l’Etat d’être le seul actionnaire majoritaire dans notre cinéma car il nous dira toujours qu’il a d’autres priorités. Demandons simplement à l’Etat burkinabè de voir tout ce qui permet de diffuser des images, et simplement de le régulariser, de l’organiser, c’est-à-dire de faire des lois faisant en sorte que chaque fois qu’un opérateur diffuse des images étrangères, il y a un tout petit peu d’argent qui revient dans la cagnotte pour faire un film burkinabè .
Jabbar !