MASA : Une clôture sur fond de bourdonnement
Point de vue

MASA : Une clôture sur fond de bourdonnement

Masa

Le Marché des arts du spectacle africain a refermé ses portes hier 12 mars 2016 à Abidjan au Palais de la culture. Depuis le 5 mars, les différentes scènes ouvertes à cet effet ont vu défiler des créateurs assez originaux et captivants. De la salle Anoumabo à l’esplanade du Palais de la culture en passant par l’Institut français de la Côte d’Ivoire, le Goethe Institut, le club municipal d’Adjamé…les festivaliers se sont gavés de la culture dans sa grande globalité et dans toute sa diversité.

En terme d’organisation rien à se mettre sous la dent. Véritable imbroglio total dans la programmation, le timing et la régie (balance). Beaucoup de spectacles déprogrammés annulés et quelques artistes attendus n’ont pas effectués le déplacement. Les acteurs culturels, pour la grande majorité que j’ai rencontrée à la faveur d’un micro trottoir ont objectivement relevé cette insuffisance.

Mareshal Zongo : «L’œuvre humaine n’est jamais parfaite » 

L’humour dans le MASA est salutaire. C’était ça ma préoccupation et c’est un combat qu’on a mené depuis longtemps. Aujourd’hui, je peux dire que je suis satisfait parce que les humoristes ont montré que l’humour un art à part entière et non un art qui accompagne les autres. Je suis satisfait malgré qu’il y ait encore des choses à améliorer. L’œuvre humaine n’est jamais parfaite, c’est vrai qu’il y a ce qu’on pense et ce qu’on veut. On a eu beaucoup d’imperfections, beaucoup de ratés mais il faut en tirer des leçons et corriger pour les prochaines éditions.

Adama Dahico : «Je suis frustré ! » 

J’ai une pensée positive pour le MASA, j’en profite pour rendre hommage à toutes ses personnalités qui ont effectué le déplacement depuis leur pays respectifs. Pour une 9è édition, on aurait bien voulu voir une organisation très parfaite. Je voudrais tout de même profiter de ton micro pour signaler qu’un homme ne montre pas son village avec la main gauche. Il y a eu des visiteurs, des artistes de tout genre, j’ai pu faire des rencontres, mais je suis tout de même frustré ! Parce que s’il y a l’humour dans le MASA, ce n’est pas tombé du ciel. Il y a un travail qui a été fait par une génération d’humoristes. Mais on ne peut pas organiser un MASA où l’humour est représenté sans au moins me remettre une invitation. Je ne suis pas content ! Je n’en fais pas un problème car je me dis que, moi-même, je suis un badge quand j’arrive on me laisse passer. Mais pour le premier humoriste ivoirien qui a fait acte de candidature à l’élection présidentielle qui n’a pas été dernier, il n’y a pas d’images mieux placées comme Adama Dahico pour affirmer qu’un humoriste n’est pas n’importe qui !

Cheick Tidiane Cheick : «Les africains doivent se l’approprier» 

Je pense que c’est quasiment une réussite, mais toutes les maladresses qui se sont produites seront corrigées pour moi. Dans la mesure où c’est une institution créé par des africains pour l’expansion de la culture africain à l’échelle universelle. Donc chaque africain doit se l’approprier et qu’il ait beaucoup plus d’engouement de la part des uns et des autres.

Jah Press : «Je suis venu signer des contrats»

Certes je suis présent au MASA mais, je n’ai pas été présent au début de l’évènement, j’étais en voyage et je ne suis qu’arrivé à la cérémonie de clôture. Je constate qu’il y a de l’engouement, de la joie, du spectacle et le public répond présent. C’est vraiment positif pour ce marché de l’art que ça représente. Il y a beaucoup de promoteurs, de diffuseurs, de producteurs et cela nous permet de se côtoyer et d’échanger sur les projets. C’est la raison d’ailleurs de ma présence au MASA. Tu sais que les KUNDE c’est pour bientôt, dernier vendredi du mois d’avril, le 29 avril prochain. Je suis là dans ce cadre pour signer des contrats.

Mamadou Maré : «Travaillons mains dans la main» 

Les artistes ont donné le meilleur d’eux-mêmes. Ils sont venus du Zimbabwe, de l’Ouganda, de l’Afrique du Sud…Il y a eu des humoristes, danseurs, conteurs. Tout cela a été une belle rencontre cosmopolite. Beaucoup de partages et d’échanges aussi bien chez les promoteurs, les diffuseurs et les artistes. Mon bilan est assez satisfaisant et je ne regrette pas d’être venu au MASA. Sur le plan organisationnel, c’est un gros chantier et il faut tirer le chapeau aux organisateurs car aucune œuvre humaine n’est parfaite. Nous devons porter un regard avec beaucoup de recul. Nous devons plutôt les aider dans l’organisation. Au lieu de faire des critiques sans apporter des solutions, j’aurai souhaité que nous travaillions mains dans la main pour réussir cette biennale.

Moussa Petit Sergent : Coup de gueule d’un sergent

La chute de ce MASA est vraiment positive pour moi, car suite à mon spectacle que j’ai diffusé ici, j’ai été approché par plusieurs directeurs de festivals des différents pays. Il y a de superbes propositions qui vont se concrétisées très prochainement. J’ai vu des beaux spectacles malgré que par moment, il y a eu des petits soucis techniques et de programmation. En ce qui concerne le soutien de mon ministère de tutelle à la faveur de la présence des artistes burkinabè au MASA, j’ai un coup de gueule à lancer. J’ai appris par l’intermédiaire de mon manager que le Ministre a décidé de soutenir les groupes burkinabè qui sont retenus à hauteur de 500 000 FCFA par groupe. Nous étions 6 groupes et je ne comprends pas pourquoi les humoristes ont reçu 200 000 FCFA alors que les autres en ont reçu 500 000 FCFA. Par conséquent, j’ai refusé de prendre cette somme que m’a tendu Ali Diallo.

Big Zino : «défaillance dans la programmation»

Je suis comblé d’avoir participé à cette 9è édition des MASA. J’ai fait des scènes devant des promoteurs de spectacles et surtout en présence des diffuseurs. Je suis vraiment heureux. Je viens de mettre sur pieds mon album «N’abandonne pas » juste pour dire que je suis bel et bien présent dans la sphère musicale et je bourlingue à travers les festivals. Je viendrai à Ouagadougou présenter cet album car ce pays m’a beaucoup propulsé sur les scènes. Quant à l’organisation du festival, il y a eu beaucoup de faille. Notamment au niveau de la programmation : l’artiste est annoncé à 18h pour sa prestation et rendez-vous compte, c’est à 23h qu’il fini par jouer.

Pascal Dimzouré (responsable de Culture Nomade) :
«Celui-ci n’a pas rassemblé du monde»

Le bilan est positif du point de vue des ateliers qu’il y a eu tout au long du marché. Sur le point de vue mobilisation, j’ai eu la chance d’assister à deux MASA avant la reprise, je trouve que celui-ci n’a pas rassemblé assez de monde.
Moses Djinko : «Sacré pouce de l’humour»

Le MASA renaît de ses cendres depuis sa 8è édition en 2014 après 7 ans d’interruption. Cette 9è vient confirmer la reprise des activités et en toute chose, il y a souvent des imperfections qui peuvent se produire notamment dans la programmation des choses. On peut souligner quelques ratés, notamment au niveau de la programmation où parfois, il y a trois scènes qui jouent en même temps au point que les diffuseurs, journalistes spécialisés qui sont venus couvrir, n’arrivent pas à s’organiser. Car il y a différents arts qui se produisent au même moment. C’est difficile ! Cela dit, de l’avis général, les choses se sont bien passées par rapport à l’édition antérieure. Sur le plan de qualité des productions, j’ai vu des spectacles hallucinants notamment au niveau de la nouvelle entité qu’ils ont intégré au MASA qui est l’humour. Ça donné un sacré coup de pouce à l’atmosphère qu’il y avait au MASA.

Augusta Palenfo : «beaucoup de couacs»

Je suis vraiment contente de participer à ce MASA car cela m’a permis en qualité de promotrice culturelle, femme du showbiz, de faire beaucoup de rencontres et c’est surtout l’importance de ma participation. Mais dans une organisation, tout n’est jamais parfait. Il y a eu assez de couacs qu’il faudrait que la direction du MASA recadre quitte à ce qu’il fasse appel aux experts des autres pays. Je trouve que l’organisation de l’édition 8 était bien plus meilleure que cette édition. La programmation est passée à côté sur toute la ligne. Comment peut-on avoir trois spectacles dans trois différents lieux dans un même endroit ? Le public ne peut pas se diviser…Nous avons souvent besoin de voir tous les spectacles car ils sont bons mais, à cause de la mauvaise programmation, on ne peut pas tous les voir. Je suggérais que les organisateurs programment les spectacles un peu plus tôt et de façon crescendo afin de pouvoir suivre tout au long de la journée, tous ou presque tous les spectacles. Renforcer l’accueil et surtout veiller encore une fois de plus à l’hygiène notamment au niveau des repas. On m’a offert un poisson qui était mal fait et je n’ai pas du tout apprécié. La sécurité des festivaliers devrait être rigoureuse et étroite. Le décès de la cuisinière de suite d’électrocution en témoigne, c’est dommage. Je critique, c’est pour améliorer mais je ne condamne pas pour autant l’équipe des MASA qui s’est bien battu pour nous offrir une 9è édition à la hauteur. On ne peut pas avoir une organisation parfaite, mais faisons le maximum.

Walib Bara : «Militons pour une transversalité de la culture»

Pour avoir participé au retour du MASA en 2007 ensuite en 2014, ce MASA devrait être celui de la maturité. Malheureusement, on constate encore beaucoup d’insuffisances en termes d’organisations pratiques. Notamment, au niveau des accréditations, de la programmation et de la ponctualité. Parfois nous avons assisté à une programmation au niveau des styles de musiques qui ne correspondent pas à des capacités de certaines salles. Des musiques assez intimistes qu’on programme dans une salle de 4000 places ça posent un souci. Pour une grande salle, on découvre un maigre public, par conséquent, l’artiste n’arrive pas à communier avec ce public là. Autre chose au niveau de cette programmation est qu’elle est simultanée. On n’a pas la feuille de route de chaque artiste. Pendant que vous êtes dans la cour, avec un plateau d’artistes off, qui jouent simultanément avec des artistes qui prestent dans les salles de 1500 places et de 4000 places. Il faut dresser un calendrier afin que tous les professionnels suivent avec intérêt selon leur choix les prestations qu’ils souhaitent. Au niveau de la communication, le MASA à mon avis devrait être la propriété de tous les abidjanais, malheureusement, vous avez des professionnels à Abidjan, qui n’ont été convié au MASA d’autres n’ont même pas entendu parler. Parce que le MASA n’a pas assez communiqué. Mais il ne faut pas jeter l’anathème sur cet évènement, car il est majeur et mérite qu’on le soutienne. Les rencontres professionnelles ont été aussi intéressantes même si je déplore le fait que, on a certains experts qui sont que théoriques. Il faudrait pouvoir trouver le juste milieu. C’est que des gens qui ont élaboré des documents théoriques viennent s’exprimer avec des exemples concrets. Le constat est clair : les subventions s’amenuisent. Le Nord souhaite que le Sud puisse prendre la question de culture. Donc nos ministères de la culture doivent être autonomes. Alors qu’on sait que dans tout gouvernement en Afrique, ce sont les ministères les plus pauvres. Comment travailler à faire changer ce paradigme ? Comment travailler à faire illustrer la transversalité de la culture ? Parce que malheureusement en Afrique, la culture est prise de façon départementale. Il faut que dans la culture, nous puissions créer les liens entre la formation académique et la formation professionnelle. On ne peut pas demander aux gens d’être des encadreurs ou des administrateurs des troupes de danse, de musique etc, si dans les curricula il n’y a pas une formation qui débouche sur ces genres de métier. Ensuite il faut que la culture cesse d’être départementale. Le MASA qui a été présidé par le Premier Ministre devait envoyer ses directeurs techniques et les autres ministères devraient être associés aux rencontres professionnelles. Parce que quand le Ministre de la culture prend son dossier, au niveau des finances il y a des problèmes. Car le discours iconoclaste de l’artiste est en déphasage à celui du financier qui est habillé en costume et cravate. Pour le régler, il faut qu’on se retrouve sur une même table pour en discuter. Quand on parle de culture, ce n’est que les managers, les producteurs, les artistes, qui sont là. Il n’y a pas de banquiers, pas de directeurs techniques du ministère de la jeunesse pourtant la culture emploi plus les jeunes. Il faut des rencontres interministérielles afin que certains s’appesantissent sur les enjeux de la culture et son impact dans le développement socio-économique du pays.

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